Le 7ème continent: un monstre de plastique

Par Clément Baudin & Edouard Muller, étudiants ESTA Belfort, 06/2020

Mots-clés: #le7econtinent #pollutiondesoceans #gpgp

D’où vient le 7e continent : l’histoire du plastique

Durant l’histoire notre utilisation du plastique a fortement changé, les premières sources d’une utilisation de plastique nous proviennent du 15ème siècle avant J.C. A cette époque, ce sont les Égyptiens qui sont en lumière avec une utilisation de colle à base de gélatine d’os. Elle était notamment utilisée dans la construction du mobilier (Le Monteil 2012).

C’est 3000 ans plus tard, lorsque Christophe Colomb trouve L’Inde sur le continent Américain, que l’utilisation de plastique naturel commence à émerger. C’est à partir du 20e siècle que le plastique naturel laisse place au plastique synthétique en grande production, dus notamment aux besoins de la première guerre et Deuxième guerre mondiale.

Figure 1 : Graphique issu du journal Les Echos sur la production de plastique depuis 1950
Source : Les Echos (mars 2020)

Le choc pétrolier de 1973 transforme aussi le plastique, qui était jusqu’alors considéré comme matière de substitution jetable et bas de gamme. Ce dernier devient alors souvent un matériel sophistiqué et de haute technicité.

De nos jours le plastique est un matériel de plus en plus utilisé. Il est plus léger et a résistance égale que l’acier ou l’aluminium et insensibles à la corrosion, ils remplacent les métaux dans beaucoup de produits, sa performance les rend indispensables au quotidien et dans tous les domaines : santé, bâtiment, automobile, aérospatiale, emballage, décoration, bureautique, sport…

La production mondiale de plastiques augmente chaque année de + 2,9 % en 2012, cependant, non seulement sa fabrication est néfaste pour l’environnement, mais l’on parle trop peu de son après utilisation. La prise de conscience des enjeux environnementaux se développe peu à peu mais reste encore insuffisante (Le Monteil 2012).

Figure 2 : Graphique issu du journal Les Echos sur la consommation de plastique en France
Source : Les Echos (mars 2020)

Les recherches actuelles sur le 7e continent

Le monde produit suffisamment de plastiques chaque année pour construire 50 pyramides de Khéops soit environ 130 000 000 de mètre cube de plastiques, cela représente 350 millions de tonnes de plastique. La plupart de ces plastiques finissent dans les décharges mais environ 8 millions de tonnes de plastique finissent dans les océans chaque année et se rassemblent grâce au courant dans des vortex de déchets (ou Garbage Patch) (Nature 2018).

Figure 3 : Graphique issu du journal Les Echos sur l’estimation de plastique dans les océans
Source : Les Echos (mars 2020)

La plus grande se trouve dans l’océan Pacifique entre l’Asie et l’Amérique du Nord et est même appelé “the great pacific garbage patch”.Il y a plus de 1.8 trillions de déchets individuels c’est plus de 10 fois le nombre d’étoiles dans la galaxie et représente 80 000 tonnes de déchets. La moitié de ses déchets sont des filles et filets de pêche venant de la pêche intensive et l’autre moitié sont principalement des plastiques dures comme des bouteilles et des films plastiques. Ce 7ème continent n’est pas un amas regroupé de plastique en plein milieu de l’océan mais est réparti sur une surface qui correspond à celle de la France, l’Allemagne, l’Italie, la Belgique, la Hollande et la Suisse combinée, soit environ 1 400 000 km² (Futura-Science 2018).

Ses impacts sur l’environnement et sur notre santé

Selon une étude publiée par Scientifique report (https://www.nature.com/articles/s41598-018-22939-w), les estimations de détritus plastiques dans les océans sont 4 à 16 fois supérieurs que celles calculées lors de précédentes études, grâce à méthodes ne mesure plus fiables. En réalité, les détritus se situent justes sous la surface de l’eau et sont translucides, ce qui qualifie ces zones de “mer de plastique”, et les rend difficilement photographiables (Scientific Report 2018).

Des recherches scientifiques ont montré que ces déchets plastiques issus de notre consommation “se dégradent extrêmement lentement et présentent une menace potentielle pour les écosystèmes marins ainsi que pour la santé humaine”.

La menace la plus directe pour la faune animale est la mort par asphyxie des prédateurs : oiseaux de mer, tortues, mammifères marins qui peuvent confondre des détritus comme des sacs plastiques et des proies. La menace plus indirecte et moins connue est l’intoxication. En effet, malgré une durée de dégradation élevée, les déchets plastiques se dissolvent en microparticules sous l’action des rayonnements solaires, par oxydation et par “abrasion de l’eau de mer” (érosion par les vagues, le charriage des courants). Ces microparticules mesures moins de 5 mm soient la taille d’un microplancton (Scientific Report 2018).

Le premier danger pour faune animale est l’absorption de ces microparticules de plastique. Le deuxième danger est que ces microparticules agissent comme des fixateurs de toxines qui viennent s’accrocher à ces microparticules, par exemple des métaux lourds. L’ingestion de ces microparticules chargées en toxines peut engendrer des conséquences sur la santé de la flore animale, et se répercuter sur notre santé lors de la consommation de produits marins. Faits inquiétants, selon une étude nous ingérons par an l’équivalent d’un cintre en plastique, tout en sachant que d’ici 2050, 99% des animaux marins auront ingérés des particules de plastique. L’ingestion ou l’inhalation de produits toxiques et microparticules de plastique à forte dose a pour conséquence connue sur la santé : cancer, neurotoxicité, trouble du développement chez les enfants (neurologique et développementale) et lésions sur le système respiratoire et reproducteur (Ciel 2019).

Figure 4 : Illustration montrant les dangers du plastique dans les océans
Source : Illustration réalisée par nos soins (mai 2020)

Les mesures prises dans le monde

La zone du GPGP représente une importante superficie de l’océan Pacifique, mais n’est en réalité que peu fréquenté par la navigation. Se situant dans les eaux internationales, aucun pays n’est contraint à participer à sa dépollution. C’est une des raisons possibles au fait qu’il n’y ait quasi-aucune action publique mise en place pour la gestion des macrodéchets en pleine mer.

Bien que peu d’actions sont mises en place pour la pollution des mers, des États et des entreprises dans le monde ont néanmoins pris conscience de leur impact écologique. On peut noter qu’aux États-Unis la ville de Seattle a décidé de bannir les pailles en 2018. Depuis plusieurs autres grandes villes américaines ont suivi l’exemple de Seattle, de même pour des compagnies aériennes américaines ainsi que les marques McDonald’s et Starbucks qui souhaitent arrêter totalement la distribution de paille en plastique d’ici 2021. Le chili et l’Inde se sont eux aussi engagés à bannir les sacs et les produits plastiquent à usage unique d’ici 2022 (Global Citizen 2018) Plus récemment en mai 2019, 186 pays de l’ONU ont décrété un accord afin de lutter activement pour la réduction des plastiques dans l’océan et une meilleure gestion des déchets plastiques. Cet accord exceptionnel n’a cependant pas été signé par plusieurs pays, dont les États-Unis, qui en 2018 consommaient jusqu’à 390 millions de pailles en plastique par jour. On peut voir que des actions sont mises en place à travers le monde, mais ses actions restent isolées et encore trop peu nombreuses. L’accord de l’ONU en 2019 est un pas en avant vers une meilleure gestion de notre plastique, mais il reste à voir si les états tiendront leurs objectifs (Global Citizen 2019).

Figure 5 : Graphique issu du journal Les Echos sur l’utilisation du plastique depuis 1950
Source : Les Echos (mars 2020)

Face à cette situation : des solutions existent-elles ?

Comme évoqué précédemment, peu d’actions sont mises en place par les états pour la dépollution des mers, car aucune législation les y oblige en eau internationale. Cependant une ONG néerlandaise a créé “L’Océan Cleanup”, une sorte d’énorme ramasse-ordures des mers, de sorte à aller nettoyer les vortex pollués par les plastiques. Le premier à prit la mer en 2018 depuis San Francisco pour se diriger vers le GPGP. Il est prévu que l’ONG déploie une soixantaine de ces navires, qui aurait pour impact de nettoyer des déchets plastiques 50%s des océans en cinq ans.

Que pouvons-nous faire à notre à notre échelle ?

On entend souvent “Si je fais un effort t pas ça qui va changer le monde !” Après cet article vous pourrez dire aux conducteurs de SUV et autres buveurs d’eau en bouteille que ce genre de réflexion ne fait rien bouger…

Nous pouvons faire des efforts et c’est justement grâce à ces efforts que les industriels vendant ces produits changeront de mentalité et évoluons donc, par exemple, sur le mode d’emballage. Prenons un exemple simple d’un plat que tout le monde connaît : les spaghettis Carbonara.

Figure 6 : Photo de spaghetti carbonara
Source : un très bon cuisinier (mai 2020)

Liste des ingrédients :

  • Pâtes
  • Lardons
  • Fromage râpé
  • Crème (pour nos amis Italiens, nous n’avons pas choisi la vraie recette à base d’œuf, mais la bonne recette à base de crème fraîche)

Pour les pâtes : il existe depuis peu la possibilité d’acheter en vrac, c’est-à-dire, sans emballage. Si vous n’êtes friand de ce genre de chose et que vous souhaitez acheter des pâtes emballées, privilégiez les emballages cartons (type Barilla) plutôt que les sachets plastiques. La dernière solution (et de loin la meilleure est la moins cher) faites vos pâtes vous-même !

Pour les lardons : abandonnez l’emballage plastique, qui au final n’est remplis qu’à ⅓ de lardons et à ⅔ de vides et privilégiez de la poitrine de porc à découper vous-même. Certes c’est plus cher, mais beaucoup plus savoureux et tellement meilleur pour la planète.

Pour le fromage : stop au parmesan, gruyère et autres comtés préparé, vous valez mieux que ça ! Achetez plutôt le fromage chez votre fromager et râpez-le-vous mêmes, Vous ferez d’une pierre 2 coups, pour la planète et pour le sourire de votre fromager qui emballe dans du papier.

Pour la crème : cela reste le plus compliqué, si votre fromager en vend, c’est le moment de le faire sourire une deuxième fois, sinon privilégier les emballages 100 % carton ou 100% plastiques recyclable.

Il y a des solutions à tout et ce ne sont pas forcément plus chers Il suffit de le vouloir.

Références

7 grandes victoires dans la lutte contre le plastique en 2018 https://www.globalcitizen.org/fr/content/wins-fight-against-plastic/ (Global Citizen 2018)

Accord historique à l’ONU : 186 pays se sont mis d’accord sur une réglementation pour lutter contre la pollution plastique https://www.globalcitizen.org/fr/content/united-nations-plastic-waste/ (Global Citizen 2019)

Evidence that the Great Pacific Garbage Patch is rapidly accumulating plastic (Scientific Report), 2018, https://www.nature.com/articles/s41598-018-22939-w (Nature 2018)

Le plastique en débat http://lemonteil.free.fr/dp/file/lesplastiquesendebat_lemonteil.pdf (Le Monteil 2012)

Le plastique en 10 graphiques https://www.lesechos.fr/industrie-services/energie-environnement/la-crise-du-plastique-en-dix-graphiques-1181798 (Les Echos 2020)

Plastique et santé : les coûts cachés d’une planète plastique https://www.ciel.org/wp-content/uploads/2019/03/Plastic-Health-French.pdf (Ciel 2019)

Un continent de plastique bien plus grand que prévu https://www.futura-sciences.com/planete/actualites/ocean-continent-plastique-bien-plus-grand-prevu-70644/ (Futura-Science 2018)

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7 commentaires

  1. J’ai beaucoup aimé l’exemple du repas à la toute fin, c’est très concret. Et il est très vrai que la plupart du temps, ce n’est pas vraiment une question d’argent, c’est une question de volonté. Et je pense que il est important de faire ces efforts mais aussi de transmettre ces nouvelles habitudes à nos proches. Merci pour cet article très intéressant.

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  2. L’article était très intéressant, j’ai appris de nouvelles choses et les chiffres parlent d’eux même, il faut vraiment que nous changions nos habitudes ! l’exemple de la recette est très sympa et prouve bien qu’il est possible de limiter le plastique rien que dans nos courses. Merci pour cet article.

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  3. Tout d’abord, merci beaucoup pour votre article Clément et Édouard.

    Votre article sur ce 7ème continent m’a fait beaucoup réfléchir. La quantité de plastique fabriquée chaque année est vertigineuse. Surtout quand la question se pose : Est-ce que tous ces plastiques fabriqués sont réellement utiles ? La réponse est bien sûr que non, rien que pour les déchets plastiques issus de notre consommation. Je pense que nous pouvons tous agir pour limiter l’achat de produits qui contiennent des plastiques inutiles. L’exemple que vous nous avez donné à la fin est très parlant.

    Néanmoins, pensez-vous que nous pourrions réellement limiter nos achats alors que la plupart des produits que nous achetons sont dans des emballages en plastiques inutiles ? Certes, nous pourrions trouver des alternatives, mais avec la société de consommation actuelle, tout le monde veut tout de suite, et avec le modèle des grandes surfaces, c’est possible.

    Également avec notre modèle de société, la société de consommation, qui nous pousse à toujours plus dépenser et que l’économie prime sur l’écologie ? En effet, nous sommes parfois obligés d’acheter des produits avec des emballages plastiques inutiles, donc je pense que tant que les entreprises qui ajoutent ses plastiques ne limitent pas eux-mêmes ou ne trouvent pas d’alternatives, la tentative des consommateurs de limiter l’achat de plastique soit vaine.

    Cependant, comme vous le dites très bien à la fin de votre article, il y a des solutions pour tout et qu’il suffit de le vouloir pour changer nos habitudes. Si tout le monde fait des efforts, nous pourrions arriver à faire bouger les choses pour protéger notre planète à long terme.  

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  4. Un triste désastre… L’utilisation des 50 pyramides de Khéops pour mettre en image notre production immense de plastique est excellente. Quand on achète notre barquette de jambon à Carrefour, on ne se rend pas assez compte que cette même barquette de plastique à elle aussi une chance de rentrer dans les rangs de ce continent de plastique. Encore une fois, c’est aussi à nous d’agir et de changer nos modes de consommation en allant chez le boucher par exemple !
    Cet article nous éclaire sérieusement sur ce que l’on voit que malheureusement très peu sur les médias, je vous en remercie.

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  5. Bonjour Edouard et Clément,
    Je tiens dans un premier temps à vous félicitez pour la rédaction de votre article !
    Les chiffres évoqués dans votre article sont très impressionnants et nous montre bien les désastres que provoque notre société moderne ! Cependant ce phénomène a été énormément médiatisé et plusieurs entreprises cherchent des solutions à ce problème mais pour le moment, il semble que la prise de conscience de la population n’a pas encore eu lieu ou alors pas suffisamment pour observer des changements notables. Selon-vous, quels seraient les meilleurs moyens pour une prise de conscience réellement efficace ?
    Cordialement,
    Bryan

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  6. Bonjour Messieurs,
    Merci pour votre article. Très interéssant et alarmant.
    Personnellement, je pense qu’on en a pas fini d’entendre parlé du plastique…
    Les grands pouvoirs, qui eux polluent le plus, sont en train de changer de politique et prendre conscience des dangers imminents. L’industrielle Barilla, par exemple, à dernièrement fait un effort en produisant ses boîtes d’emballages entièrement en carton, sans la fenêtre plastique, pour pourvoir recycler la boîte en toute simplicité. Ce qui parait tout à fait plus logique.
    Concernant le 7ième continent, est-ce que quelque chose est fait pour le nettoyer, le détruire. Là bêtise est toujours présente et activement nuisible. Il serait peut-être aussi utile de « nettoyer » les fautes présentes en parallèle à la réflexion de ne plus les réfaires. Est-ce que vous connaissez des solutions applicables et efficaces utilisés aujourd’hui ?

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