Par Arno Cicutta & Antoine Ruesz, étudiants ESTA Belfort, 03/2021
Mots clés : #énergies renouvelables #panneaux solaires #Sahara
Afin de répondre aux besoins mondiaux en énergie, plusieurs pays décident de mettre en place une transition énergétique. Cette transition doit permettre d’atteindre des objectifs énergétiques décisifs pour le futur de notre planète, il faut absolument réduire nos consommations d’énergies et nos émissions de co2. En effet, la consommation mondiale ne cesse d’augmenter et nos réserves d’énergies, au contraire, ne cessent de diminuer. En additionnant à cela une forte croissance de la population mondiale, il est urgent d’agir en matière d’énergie et de se remettre en question.
Les énergies renouvelables sont donc le pilier de cette transition énergétique. Cependant la part de production d’énergies renouvelables ne représente qu’une petite partie du « mix énergétique » d’environ 25%.
L’énergie solaire qui est l’énergie renouvelable la mieux connue et la plus utilisée à différentes échelles, pourrait être utilisée dans des projets innovants pouvant répondre aux problématiques citées ci-dessus.
Un des projets qui pourrait voir le jour dans un futur proche consisterait en le fait d’utiliser le désert du Sahara comme zone de production de masse d’électricité à l’aide de panneaux solaires.
Pourquoi les énergies renouvelables ont-elle du mal à se développer?
En 2017, la demande mondiale d’énergie était de 18 térawatts. La production mondiale d’électricité en 2017 était issue à environ 64% des combustibles fossiles, à environ 10% du nucléaire et à environ 26% des énergies renouvelables. Parmi ces 26% de production issue des énergies renouvelables, 16,2% proviennent d’hydroélectricité, 4,8% proviennent de l’éolien, 2,1% proviennent du solaire, 1,9% de la biomasse et 0,3% de la géothermie. Le solaire ne représente que 2,1% ! Nous pouvons nous demander pourquoi nous n’utilisons pas plus l’énergie solaire, et de manière générale les énergies renouvelables dans notre « mix énergétique » ?

La principale raison de cette faible production s’explique par deux facteurs :
D’une part les énergies renouvelables sont des énergies à intermittence et d’autre part le stockage de l’électricité fait face à des problèmes technologiques latents.
En effet, personne ne peut gérer le soleil ou le vent, et ces aléas météorologiques se traduisent par une production d’électricité extrêmement variable. Cet aspect de la production est un gros problème pour l’utilisation de l’électricité.
Le réseau électrique doit être équilibré entre l’offre et la demande de manière constante pour pouvoir assurer une fréquence constante à 50Hz (Le stockage de l’électricité, Article de la conscience des étudiants). Pour pouvoir assurer un équilibre il est important de suivre l’évolution des consommations d’électricité pour pouvoir ajuster la production. C’est là que les énergies renouvelables qui sont confrontées à une forte intermittence pose des problèmes. Il est très difficile d’ajuster leur production d’électricité.
On pourrait se dire qu’il suffit de stocker l’énergie produite en surplus, puis de l’envoyer dans le réseau électrique lorsque la consommation augmente. Mais là encore on est confronté à un problème… D’un point de vue technologique, nous ne sommes pas capables de stocker l’électricité à l’échelle de la consommation mondiale.
Pourquoi le désert du Sahara pour les panneaux solaires?
Le désert du Sahara représente un énorme potentiel pour les panneaux solaires. En effet c’est le désert le plus grand du monde avec une superficie d’environ 9 millions de km². De plus, c’est l’un des endroits les plus chaud et les plus ensoleillé de la planète ! Ces deux atouts géographiques et climatiques permettent l’installation d’un gigantesque parc solaire, parmi les plus performant en termes de production !
D’après une étude menée par l’Université du Maryland on estime que seulement ¼ de la surface serait nécessaire à une production répondant aux besoins mondiaux d’électricité. Ils estiment que ces énormes parcs solaires pourraient permettre de produire 82 térawatts d’électricité.
De plus le désert du Sahara offre d’autres avantages. Etant constitué principalement de sable, il serait facile et utile d’extraire ce sable pour en faire du silicium qui est le matériau utilisé par les panneaux solaires pour créer de l’électricité.
Enfin, ce projet trouve tout son sens dans le fait que cette zone de la planète est fortement ensoleillée presque toute la journée et tous les jours de l’année. L’intermittence est donc beaucoup moins présente et impact donc beaucoup moins la production ! En effet, avec des panneaux solaires qui produiront de l’électricité de manière constante, il sera beaucoup plus facile d’ajuster les productions en fonction des consommations. Cela pourrait se faire par le biais de volets roulants qui diminueraient la production lorsqu’il est nécessaire de le faire ou au contraire de l’augmenter.
On pourrait donc construire un nouveau réseau électrique véhiculant une production d’électricité faite à partir d’énergies renouvelables, tout en étant équilibré entre l’offre et la demande.
Des projets ont déjà vu le jour notamment au Maroc où de grandes fermes solaires ont été installées (fig.2), utilisant différentes techniques de production pour pouvoir les analyser et à termes choisir les techniques les plus performantes pour des projets futurs.
Depuis que le Maroc n’est plus producteur de pétrole, il importe 94 % de son énergie. Grâce à ce projet, le désert sera la première source d’énergie du pays et cela pourra permettre au Maroc d’être autosuffisant et de réduire ses émissions de carbone.
Une avancée écologique considérable…

Les impacts sur l’environnement, la faune et la flore
Installer autant de panneaux solaires dans le désert pourrait certainement subvenir aux besoins de l’humanité, mais quel serait l’impact sur la faune et la flore ?
Dans un premier temps il faut comprendre l’effet que va créer l’installation de ces panneaux solaires. Le sable du désert est de couleur clair et reflète donc beaucoup la lumière du soleil, ce qui le maintien à une température suffisamment basse pour servir d’abris à une multitude d’espèces. Installer autant de panneaux conduirait à deux phénomènes : le premier consisterait au réchauffement du sable. Les panneaux solaires sont plus sombres que le sable et empêchent une partie de l’énergie solaire d’être reflété vers le ciel. (4-5)
Le sol va donc prendre en température et cela pourrait avoir un impact sur des espèces d’animaux ou de végétaux pour qui le sable fonctionne comme une protection. Dans un second temps, cette augmentation de la température du sol pourrait provoquer l’apparition de pluie jusqu’alors très rares dans cette région.
Ce phénomène est dû au fait que, le sol étant plus chaud, il va également relâcher de l’air plus chaud, et cet air va alors se mélanger avec de l’air plus froid présent dans le ciel et créer de la condensation. (4-5) La condensation va permettre des précipitations et donc, l’arrivée de la pluie.
Le fait de créer des précipitations va permettre d’améliorer les conditions climatiques du désert. Elle va permettre une meilleure diversification des végétaux, une plus grande prolifération qui va aussi créer un environnement plus propice à d’autres espèces qui n’en avaient pas la possibilité avant. Certaines espèces qui utilisaient le sable à leur avantage, comme la vipère du désert, qui en porte la couleur pour mieux se camoufler, vont devoir s’adapter à un nouvel environnement, se déplacer vers une autre partie du désert au risque de disparaître.
Néanmoins ces précipitations profiteraient à beaucoup plus d’espèces et les impacts sur le climat régional serrait plus bénéfique que nuisible. La végétation pourrait évoluer de 20% dans les zones d’installations. (6)
On remarque (fig.1) que des changements climatiques, représentés par Δ (en Kelvin ou millimètres de précipitations par jour), vont directement impacter les zones couvertes par des panneaux solaires, représentés en gris.


Source : Yan Li et al., (2018). Climate model shows large-scale wind and solar farms in the Sahara increase rain and vegetation, consulté en 2021.
La question de l’éthique
Le fait d’installer autant de panneaux solaires sur un continent comme l’Afrique constitue un réel défi socio-économique. En effet, en raison de la situation actuelle du continent, il faudrait se poser la question de la légitimité de cette énergie. Réussir à éviter des conflits qui se sont déjà répétées par le passé et qui rendraient la situation encore plus complexe qu’elle ne l’est déjà. Si des étrangers venaient à financer ces installations sur un pays qui ne leur appartient pas, il faudrait réussir à trouver une juste répartition de l’énergie. Les pays aux alentours, en voie de développement, doivent pouvoir en profiter pour accélérer ce développement et ne pas se contenter de prendre la totalité de cette énergie pour la stocker et continuer à maintenir les prix des marchés occidentaux. Un tel projet avec un aussi gros enjeu environnemental ne doit pas entraîner de conflits politiques. Si cela venait à arriver, il serait facile pour les pays voisins de venir détruire les installations mises en place, à moins d’installer une surveillance en continue ce qui rendrait le projet beaucoup plus complexe (7). Si tous les pays en profitent à part égale, cela pourrait être bénéfique pour tout le monde en plus de réduire considérablement les émissions CO2. De plus, le transport de l’électricité en Europe engendrerait beaucoup de pertes en termes de rendements, et les pays voisin ne possèdent pas forcément des infrastructures viables, permettant un bon acheminement de l’électricité. (7)
Pour conclure, il s’agit ici d’un projet d’une envergure colossale et les plus gros obstacles à sa réalisation résident dans les conflits qu’il pourrait engendrer, autant sur le plan social qu’environnemental. Il est important cependant de se rendre compte que, technologiquement, nous pourrions répondre aux besoins en électricité de la planète et se débarrasser progressivement des énergies fossiles.
Références
Louis lebrun & Adrien marion. (2020). Le stockage de l’électricité, La conscience des étudiants, [en ligne]. [Consulté le 16 Février 2021]. Disponible à partir de : Le stockage de l’électricité – la conscience des étudiants (laconsciencedesetudiants.fr)
IEA. (2020). Donnée consommation d’électricité. International Energy Agency [en ligne]. [Consulté le 14 Février 2021]. Disponible à partie de : https://www.iea.org/data-and-statistics?country=WORLD&fuel=Energy%20consumption&indicator=TFCbySource
Fabrice, P, (2018). Sahara : De gigantesques fermes éoliennes et solaires dans le Sahara pour favoriser la pluie dans le désert ? 20 minutes planète [en ligne].[Consulté le 15 Février 2021]. Disponible à partir de : dans le désert ? (20minutes.fr)
Yan Li et al., (2018). Climate model shows large-scale wind and solar farms in the Sahara increase rain and vegetation, Sciences [en ligne], 1-5. [Consulté le 17 Février 2021]. Accessible à: doi: 10.1126 / science.aar5629
Sciences et Avenir., (2018). Sahara : éoliennes et centrales solaires pourraient modifier localement le climat, Sciences et Avenir avec AFP [en ligne], 1-2. [Consulté le 16 Février 2021]. Disponible à partir de : https://www.sciencesetavenir.fr/nature-environnement/climat/sahara-eoliennes-et-centrales- solaires-pourraient-modifier-localement-le-climat_127292
SYMPA., (2019). Et Si le Désert du Sahara Était Recouvert de Panneaux Solaires ? [en ligne] Réalisé par SYMPA. [12 février 2021]. Disponible à partir de : https://www.youtube.com/watch?v=bDx3_DDyY6Q&ab_channel=SYMPA
Et Si – What If Français., (2021). Et si on recouvrait le Sahara de panneaux solaires ? [en ligne] Réalisé par Et si. [17 Février 2021]. Disponible à partir de : Et si on recouvrait le Sahara de panneaux solaires ?
Article très intéressant ! Malgré les différents freins liés au projets comme les potentiels conflits politiques, l’impact sur la faune et la flore ainsi que le coût de la mise en place, cet article est très intéressant. En particulier car il démontre que nous serions, technologiquement en capacité de mettre en œuvre un tel projet et que, de plus, ce dernier pourrait répondre à nos demandes d’énergie. Très enrichissant !
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Vraiment instructif, je n’aurai jamais pensé que ce projet aurait pu avoir un impact aussi grand sur la biodiversité.
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Un scénario « Et si…? » plutôt captivant, cela permet de pendre conscience du potentiel plus ou moins positif de certaines régions du monde.
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Article très intéressant, un beau projet qui donne envie de creuser encre plus
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Article instructif avec une réelle travaille de recherches qui mais en lumière un problème réel, énergie renouvelable oui ! Mais ne détruirons-nous pas un écosystème dans notre recherche d’énergie verte ?
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Un projet ambitieux présenté avec soins dans cet article par de vrais initiés des énergies solaires.
à voir si celui ci se réalisera. Après toutes ces années nous avons trouvé une nouvelle manière de coloniser à nouveau l’afrique. Partagerons-nous cette fois ci ?
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Projet qui fait rêver par l’ampleur de son rendement puisqu’il permettrait de satisfaire les besoins mondiaux en électricité, mais qui génère également une certaine angoisse fasse à la création d’un monopole créant ainsi une dépendance à l’Afrique. Ne vaudrait-il pas mieux recourir à différentes sources d’énergies vertes afin de diversifier l’offre ?
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Article intéressant. L’étude du changement de la biodiversité lors de l’installation de grandes surfaces de panneaux solaires invite à se poser les bonnes questions.
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Sujet passionnant et plus que jamais d’actualité. Reste la question de la faisabilité, notamment dans le desert ou le vent module sans cesse les dunes et le sable.
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Super article ! je n’avais jamais pensé à cette ressource qu’est le Sahara. Malheureusement, cela montre bien que dernière chaque nouvelle solution se cachent de nouveaux problèmes…
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